FAUT-IL COMBATTRE NOS DESIRS ?
Par Mme Lefebvre
· Faut-il = est-ce absolument
nécessaire ? La nécessité de combattre nos désirs est d’ordre
« moral ».
· Combattre = lutter jusqu’à vaincre,
anéantir. Un désir est vaincu lorsque je décide de renoncer
à le satisfaire ; Ne pas confondre l’action de combattre et celle de
maîtriser, c’est à dire régler mes désirs, leur imposer d’être
raisonnables. Il faut combattre ce qui peut nuire à la qualité morale
de ma conduite, c’est à dire ce qui me pousse à la méchanceté envers les
autres (cruauté, injustice, humiliation, domination, fait de traiter autrui
non comme une personne mais comme une chose) ; ainsi que ce qui me
pousse à me conduire d’une façon contraire à ma propre dignité.
· Nos désirs = faire la
distinction entre combattre les objets de nos désirs et combattre le
fait même de désirer.
Lorsque je désire une chose, je ressens immédiatement à sa vue une émotion
intense, un plaisir en comparaison duquel tout autre chose paraît dépourvue
d’intérêt ; je me projette aussitôt dans l’avenir et cette chose
m’apparaît comme étant une promesse de plaisirs à venir ; la perspective
d’en être séparé m’est aussitôt insupportable, ce qui fait naître la volonté de
la posséder.
Le désir ressemble alors
à un besoin mais ne doit pas être confondu avec le besoin : certes, avoir besoin d’une chose signifie ne pas
pouvoir s’en passer : je ne peux plus me passer de l’objet de mon
désir mais pour une raison différente de celle qui concerne l’objet
d’un besoin :
· si l’objet de mon désir me
manque ma souffrance est de l’ordre de la
tristesse ; ma vie n’a plus de sens... ma volonté de le
posséder peut devenir une
obsession qui accapare mon esprit et nuit à ma liberté de
penser
· alors que si un
objet dont j’ai besoin me manque, c’est essentiellement un
sentiment de contrainte que j’éprouve : je ne
peux pas faire ce que je veux ; et
si c’est un aliment dont j’ai besoin qui me
manque, ma vie est en danger.
Problématisation
Si l’on fait clairement la
différence entre un désir et un besoin, on découvre un dilemme :
· D’un côté,
puisqu’il faut lutter contre ce qui peut nuire, il faut lutter contre la
privation de
liberté
à laquelle peut conduire l’attachement obsessionnel à l’objet d’un désir et
quand la
satisfaction d’un
désir devient un besoin...
· D’un autre côté,
c’est par la faculté de désirer que l’homme peut
donner un sens à sa vie.
un être
humain ne se conduit pas en être humain mais en simple animal s’il ne cherche
pas
à donner un
sens à sa vie...Il est alors impensable de vouloir anéantir la faculté
de
désirer...
® Problème = comment
lutter contre le désir quand il devient nuisible sans anéantir la capacité de
désirer ?
Solution
On se met en général à
désirer une chose sans l’avoir prévu... voir le « coup de
foudre » ...
L’idéal serait que mon
libre arbitre soit assez puissant pour que je me demande, lorsqu’un désir
s’éveille, si je fais bien de désirer la
chose qui a éveillé mon désir, pour qu’il soit plus important pour moi de
veiller à mon bien et à ma liberté de choix qu’à jouir d’un plaisir...
Le désir n’est aliénant
que si le libre arbitre est défaillant et si je n’ai pas solidement conscience
de mon bien.
Mais dans une société qui a
fait le choix de la croissance économique, il faut consommer ce qui est mis sur
le marché, la richesse découlant du commerce...Or on obtient que le
consommateur achète en lui présentant les choses comme lui étant
indispensables. La société de consommation transforme le désir en besoin. Et
s’il me faut ce dont j’ai besoin, je désire moins exercer mon libre arbitre.
® La qualité morale
de nos désirs dépend donc de l’éducation du libre arbitre et celle-ci à son
tour du but poursuivi par la société à laquelle nous appartenons...