VOULOIR ACCOMPLIR TOUS MES DESIRS, EST-CE UNE BONNE REGLE DE VIE ?

Par Mme Lefebvre

1)  Vouloir = faire consciemment le choix de faire une chose et s’y tenir

 

2)  Accomplir tous mes désirs = accomplir n’est pas la même chose que satisfaire un désir : on peut satisfaire un désir en imagination, en rêve ; tandis que l’accomplir signifie agir pour le réaliser, effectuer les actions nécessaires à sa réalisation. Noter également qu’une chose accomplie est une chose terminée…

 

3)  Tous mes désirs = la règle ici en question consiste à ne s’interdire de réaliser aucun désir, à vouloir accomplir n’importe quel désir sans faire de choix.

· Mes désirs = Le plaisir n’est pas seulement une sensation qui accompagne la satisfaction d’un besoin ; les hommes recherchent le plaisir pour lui-même ; cette recherche du plaisir constitue le désir.

Ne pas confondre un désir et une pulsion, qui est un appétit de plaisir soudain et qui exige impérativement d’être assouvie et qui ne veut se plie à aucune règle : exemple l’enfant qui réclame soudain un objet et trépigne jusqu’à ce qu’on le lui donne.

Ne pas confondre les désirs « sains » : appétit de plaisir qui n’a pas un caractère obsessionnel mais qui est capable de patienter, qui est moteur de créativité et de capacité d’adaptation ; et les désirs « pathologiques » qui résultent du refoulement violent des premiers objets sur lesquels s’est fixé l’appétit de plaisir de l’enfant.

Le propre du désir est d’être sans fin : je désire le plaisir aussi longtemps que je suis en vie. L’accomplissement de nos désirs ne peut donc pas avoir de fin.

 

4)  Une bonne règle de vie = Une règle est une manière de se conduire, une ligne de conduite en vue d’atteindre un but qui a pour caractéristique d’être méthodique, rationnelle ; d’être  définie clairement ; de ne pas laisser de place au hasard ; d’être une manière d’agir qu’il faut suivre une fois qu’elle a été établie. suivre une règle implique d’être discipliné.

Une règle de vie = une règle conçue pour diriger ma vie toute entière, me permettre d’atteindre le but que j’ai choisi de donner à ma vie.

Une bonne règle de vie = Deux façon de comprendre « bonne » : soit bonne signifie efficace ; soit bonne signifie conforme au « Bien », à ce dont la raison reconnaît la valeur morale, c’est à dire soit au bonheur, soit à la vertu : une conduite est vertueuse si elle est raisonnable ; elle est raisonnable si elle est modérée et si elle n’est pas contraire aux valeurs universelles de la raison, l’honnêteté, la justice, la bienveillance envers autrui, le respect des droits universels fondamentaux, en particulier la liberté de penser, la liberté de conscience, la liberté d’expression ; le droit de propriété, la conscience que je suis une personne douée de raison, et pas une bête qui cède à ses pulsions, qu’autrui est une personne et non une chose et que je ne peux donc pas lui imposer ma volonté mais prendre en considération sa volonté ; être raisonnable signifie refuser  tout recours à  la violence.

® La question demande si la volonté d’accomplir tous mes désirs est une ligne de conduite en accord avec tous les critères d’une bonne règle de vie.

 

Problématisation

 

· D’un côté, comme on le développerait dans une première partie, vouloir accomplir tous nos désirs :

1)       est une règle qui découle du désir de plaisir commun à tous les hommes, donc naturel.

2)       si je me donne pour règle de réaliser tous mes désirs, c’est que j’accepte la discipline qu’implique la notion de règle ; vouloir accomplir tous mes désirs, en ce sens, exclut de vouloir mener une vie déréglée ;

3)       se donner pour règle d’accomplir tous ses désirs implique de faire appel à l’intelligence et au raisonnement pour réussir à avancer de désir en désir ; cela exclut de vouloir soulager des pulsions, assouvir des fantasmes, les désirs obsédants devenus des besoins dont on est dépendant et qui poussent à faire n’importe quoi plutôt qu’à agir de manière ordonnée ; il ne serait donc pas contraire à la raison de vouloir accomplir tous mes désirs.

4)       D’autre part, la volonté d’accomplir un désir décuple le sens de l’effort, le dépassement de soi, la persévérance qui est une vertu : je peux trouver la force de vaincre mes faiblesses pour accomplir un désir, comme par exemple conquérir l’amour de l’autre...la règle de vouloir accomplir tous mes désirs n’est donc par forcément contraire aux règles morales.

 

· D’un autre côté, comme on le développerait dans une seconde partie,

1)       est-ce une bonne règle de vie de poursuivre un désir dont l’accomplissement est incertain et dangereux ? C’est une règle contraires à celles qui assurent un bonheur durable et tranquille.

2)       Est-ce une bonne règle de vie de vouloir accomplir un désir qui ne dépend pas entièrement de moi, c’est à dire de ma volonté ? L’accomplissement des désirs qui ne dépendent pas de moi est voué à l’échec.

3)       M’obstiner à accomplir des désirs qui ne dépendent pas de moi revient à négliger ma faculté de choisir quels désirs je veux et je peux réaliser.

4)       D’autre part, Est-ce une bonne règle de vie de vouloir accomplir tous mes désirs si pour y parvenir, je ne recule devant aucun moyen : La recherche de l’efficacité ne risque-t-elle pas d’être contraire à la recherche du bien ? Exemple : le désir de conquérir le pouvoir, le désir de richesse qui ne reculeraient devant aucun moyen d’écarter les rivaux, ni devant la flatterie, ni devant la corruption...

 

® Problème : Il apparaît que vouloir accomplir tous nos désirs est bien une règle de vie ; mais ce n’est pas nécessairement une « bonne » règle de vie car elle peut être contraire soit à la recherche du bonheur, soit à celle de la vertu.  Le problème ne réside-t-il pas dans la volonté d’accomplir « tous » nos désirs ?

 

Solution proposée

 

Vouloir accomplir tous nos désirs : Une bonne règle de vie  si cela ne veut pas dire accomplir n’importe quel désir mais consiste à bien choisir les désirs qui sont dignes d’être accomplis pour être heureux tout en se conduisant bien…

 

Citation de Descartes à l’appui : « l’erreur qu’on a coutume de commettre (en ce qui concerne l’accomplissement des désirs ) n'est jamais qu'on désire trop, c'est seulement qu'on désire trop peu ; et le souverain  remède  contre cela est (…)  de tâcher de connaître bien clairement et de considérer avec attention la bonté  de ce qui est à désirer ».