"Obéir aux lois et aux coutumes de mon pays" dans quelle mesure cette maxime est-elle recevable?
Analyse des termes du sujet

Lois = ici, règles de droit qui définissent ce qui est interdit, ce qui est obligatoire ou ce qui est simplement autorisé afin de régir les activités des hommes dans la société

Le problème : les lois sont-elles forcément légitimes alors qu'elles sont variables historiquement et relatives aux Etats? S'il faut parfois déroger à cette maxime, comment ne pas sombrer dans l'arbitraire d'une norme subjective, particulière et intéressée? Quels critères peut-on ou doit-on alors imposer à cette autonomie par rapport à la loi?

Recevable = acceptable, ce qui peut aller du souhaitable au seulement tolérable
Ce qui justifie cette recevabilité :
- la nécessité : on ne pourrait faire autrement
- l'utilité : cette obéissance sans forcément être nécessaire serait profitable
- la légitimité : cette obéissance est justifiée

Mesure : jusqu'à quel point? Totalement ou absolument? Partiellement? Le sujet semble exclure jamais. Le présupposé est donc que cette obéissance est d'ordinaire justifiée.

Problématisation
Si l'obéissance aux lois et aux coutumes peut être contestée, au nom de quels critères peut-elle l'être et cette contestation ne risque-t-elle pas d'ouvrir à une désobéissance arbitraire et dangereuse?
Plan sommaire

I. Cette maxime est hautement recevable car :
1) L'obéissance aux lois et aux coutumes est nécessaire.
En effet, si l'on raisonne par l'absurde, la désobéissance aux lois conduit à l'insécurité
- sous la forme de la délinquance
- mais aussi sous la forme de la répression que celle-ci susciterait dans une société inquiète.
Le respect des coutumes renforce la cohésion sociale.
2) L'obéissance est efficace dans l'urgence de l'action ou pour se consacrer à des activités qui exigent la mobilisation de toutes nos facultés; elle évite de se dépenser en hésitations.
3) L'obéissance est légitime du moins dans une République puisque les lois y sont élaborées dans l'intérêt général. En revanche la légitimité des coutumes peut plus facilement être contestée dans la mesure où elles dérivent de la tradition et non de la réflexion du législateur.
4) La justice elle-même est définie comme l'obéissance aux lois de sorte que l'homme juste préférera subir une injustice plutôt que d'en commettre une.

II. Toutefois cette obéissance peut être insuffisante, dangereuse et illégitime.
1) La nécessité peut justifier la désobéissance : transgresser la loi pour sauver une vie. En effet les lois d'un système juridique positif peuvent entrer en contradiction de sorte qu'il faut s'interroger sur celle qui doit prévaloir.
2) La facilité que procure l'obéissance zélée est aliénante et dangereuse dans la mesure où elle me dispense de réfléchir par moi-même, dans la mesure où elle me conduit à m'en remettre au respect automatique de la lettre des lois et des coutumes. Renoncer ainsi à l'autonomie de sa réflexion pour guider sa vie n'est-ce pas renier une part de son humanité?
3) En outre la stricte application de la loi peut être inéquitable : nécessité de l'équité comme juste compensation de la justice simplement littérale.
4) La légitimité de certaines lois, de certaines coutumes est contestable puisque des lois contraires animent les droits positifs de différents Etats dans le monde. L'attitude légaliste n'est-elle pas alors critiquable?

III. A quelles conditions cette maxime est-elle recevable?
1) Une obéissance générale, une désobéissance exceptionnelle que la loi elle-même peut prévoir : la légitime défense, action par nécessité ou par contrainte.
2) La désobéissance aux lois positives relatives aux Etats et variables historiquement suppose la référence à une norme supérieure. Pour n'être pas arbitraire, celle-ci doit être invariable et universelle. Elle est donc forcément formulée de manière générale (sous peine d'être rendue obsolète par des changements de priorités dans les préoccupations de l'humanité) et prétend valoir universellement, c'est-à-dire pour tous les hommes et tous les Etats.
Toutefois cette norme générale connaît des formulations qui varient histioriquement et dont le but est de la préciser en fonction des circonstances dans lesquelles il apparaît nécessaire de la soutenir. C'est cet idéal que s'efforce d'exprimer semble-t-il la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de l'ONU de 1948.
3) La loi et le droit s'adressent à la liberté de l'homme. Tout comme l'obéissance à la loi relève d'une autonomie de la réflexion et non d'un automatisme du comportement, la désobéissance à la loi suppose une réflexion critique; nul ne peut déléguer cette responsabilité et se cacher derrière le conformisme et le légalisme aveugles de citoyens zélés mais irresponsables. Renoncer à penser ainsi de manière autonome, renoncer à répondre de ses actes sous prétexte qu'ils sont conformes à la loi, c'est prendre le risque de se faire l'instrument du mal.