Sujet : L'expérience peut-elle démontrer quelque chose ? |
Travail préparatoire au brouillon |
Analyse des termes du sujet |
Expérience:
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au sens courant, l'"instruction acquise par l'usage de la vie" (F. Alquié, L'expérience)
- au sens le plus large, tout contact avec la réalité sensible # observation, perception
- au sens scientifique , la mise à l'épreuve d'une conséquence observable d'une théorie (expérimentation)
Quelques synonymes : observation, expérimentation, test, leçon, savoir, vécu
Quelques notions qui peuvent lui être opposées en certains sens : théorie, hypothèse, abstraction, intuition
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Peut : du verbe pouvoir, indique :
- la capacité
- la permission, le droit
- l'opportunité |
Démontrer : la démonstration est un procédé par lequel à partir de propositions admises, on tire une conclusion nécessaire.
Cette nécessité signifie que la conclusion ne peut être autre qu'elle n'est; c'est de la que la démonstration tire sa valeur.
Pour démontrer, on utilise des procédés déductifs, directs ou par l'absurde, éventuellement, en mathématiques, par récurrence.
Le syllogisme est une des formes les plus célèbres de déduction.
Le caractère de certitude lié à la démonstration s'appelle l'apodicticité; on parle ainsi de raisonnement apodictique.
Quelques notions qui peuvent lui être opposées : montrer, expérimenter
Quelques synonymes : prouver, argumenter, raisonner |
Quelque chose : désigne quelque chose d'indéfini
Cette expression sous-entend que le pouvoir de la démonstration est peut-être limité voire nul. Il faudra se demander quel est ce quelque chose que l'expérience pourrait démontrer (si elle ne peut démontrer la vérité d'une théorie, ne pourrait-elle en démontrer la fausseté?).
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Présupposés du sujet : |
Le sujet remet en question de la valeur de l'expérience aussi bien comme savoir vécu que comme pilier des sciences expérimentales et modernes (physique, chimie, biologie).
L'expérience, peut-être, ne démontre pas ce à quoi l'on s'attendait ou, si elle peut prouver quelque chose, elle ne constitue pas à proprement parler une démonstration. Ou encore elle ne joue un rôle démonstratif que dans un raisonnement dans lequel elle s'insère (le raisonnement expérimental). |
Problèmes : |
Il existe une hétérogénéité entre l'expérience et la démonstration.
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L'expérience est concrète et matérielle alors que la démonstration est abstraite et intellectuelle. Comment peut-on alors envisager que l'expérience puisse constituer une démonstration? Ou alors comment faut-il envisager le rôle que celle-là peut jouer dans celle-ci?
- L'expérience est particulière alors que la démonstration prétend être universelle ou générale.Le pouvoir de l'expérience ne consiste-t-il pas seulement à montrer? A falsifier c'est-à-dire à réfuter plutôt qu'à vérifier?
N.B.: Vous pouvez ici remarquer combien est précieuse la connaissance des notions-repères du programme et que la connaissance du cours peut vous aider à analyser le sujet.
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Axes de réflexion : |
- Au sens le plus large de démontrer, que peut prouver l'expérience?
- Au sens plus restreint de son usage scientifique, comment s'insère-t-elle dans le raisonnement expérimentale? Quelle est la portée vérificatrice de l'expérimentation? Ne faut-il pas plutôt souligner son rôle réfutateur? Et celui-ci est-il si fiable que cela?
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Plan possible (ne sont ici formulées que les idées et les principaux moments de l'argumentation): |
I. L'expérience et la démonstration : deux procédés opposés.
1) Des caractères opposés.
L'expérience porte sur ce qui est contingent alors que la démonstration porte sur ce qui est nécessaire. On voit mal alors ce qu'elle pourrait démontrer.
2) L'expérience est singulière ou particulière alors que la démonstration est générale ou universelle. On voit mal comment elle pourrait dépasser le statut de l'exemple. Tel est le problème que pose l'induction.
3) L'usage de la démonstration exige de ne pas recourir à des expériences qui permettent de montrer.
Un calcul est une forme d'expérience. La différence entre la monstration et la démonstration du théorème de Pythagore, par exemple. Platon interdisait à ses élèves de mathématiques le recours à des instruments.
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Transition :
Néanmoins cette opposition n'est-elle pas superficielle? Ne peut-on lier mathématiques et physique? |
II. Un usage démonstratif de l'expérience.
1) L'expérience est apte à démontrer l'existence de certaines choses singulières (L'apôtre Thomas, dans la tradition chrétienne, a besoin de voir et de toucher pour assurer sa foi sur une certitude. La démonstration de l'existence de Dieu n'est pas possible par le seul secours des concepts mais supposerait le recours à l'expérience comme l'explique Kant dans la Critique de la raison pure).
Toutefois s'agit-il d'une véritable démonstration si la preuve se confine à des cas singuliers?
2) L'expérience ne joue véritablement un rôle démonstratif que dans le cadre expérimental en s'insérant dans le raisonnement expérimental qui, selon Claude Bernard (Introduction à la médecine expérimentale), suppose que l'on formule une hypothèse, qu'on détermine un protocole expérimental et qu'enfin on observe ou non l'apparition du phénomène attendu.
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Transition :
Toutefois ce rôle de l'expérience dans le raisonnement expérimental apporte-t-il la certitude caractéristique de la démonstration, une conclusion nécessaire? |
III. L'impossibilité d'une conclusion absolument certaine du raisonnement se fondant sur l'expérience.
1) Le caractère non fiable de l'expérience sensible en général. Sensibilité et illusions.
2) Il n'y a pas à proprement parler de vérification expérimentale car l'usage d'observations particulières dans le raisonnement expérimental n'est pas concluant pour prouver un énoncé (la loi scientifique) qui prétend valoir universellement (pour tous les cas de même type). Selon K. Popper (Conjectures et réfutations), l'expérimentation n'a à proprement parler qu'un pouvoir réfutateur ou falsificateur.
3) Et même la falsification expérimentale n'est pas absolument concluante car les instruments qui permettent de transformer les concepts de la loi scientifique en données observables et qui permettent ainsi d'observer et de mesurer dépendent de théories qui elles-mêmes n'ont pas pu être vérifiées, absolument parlant. De sorte que si l'expérience infirme l'hypothèse, on ne peut conclure que c'est l'hypothèse qu'il s'agissait de tester qui est fausse ou si c'est une ou plusieurs des hypothèses auxiliaires.
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Introduction :
Selon l'évangile de Jean (20, 19-31), l'apôtre Thomas ne crut en la réalité de la résurrection de Jésus qu'après avoir expérimenté par la vue et le toucher les stigmates de la crucifixion sur le corps du Christ. Pourtant l'expérience est-elle capable de démontrer quelque chose hormis des faits aussi singuliers? En effet, la démonstration est un procédé déductif qui prétend valoir universellement alors que l'expérience est particulière, sensible (et du coup parfois trompeuse) et ne peut atteindre la généralité que par induction. Ces différences suffisent-elles à invalider la capacité démonstrative de l'expérience ou au contraire, sachant qu'elle ne silimite pas à la simple observation mais peut être comprise comme expérimentation, l'expérience ne peut-elle sous certaines conditions satisfaire aux mêmes exigences d'apodicité et de nécessité que la démonstration? Ou bien faut-il mieux délimiter ce quelque chose, s'il n'est pas rien, que l'expérience pourrait démontrer? Et en quel sens du mot démonstration? |
Conclusion :
Nous avons donc montré que nous pouvions utiliser l'expérience dans un processus démonstratif dès lors que l'on s'efforce de connaître notre monde physique même quotidien et pas seulement le monde idéal (fait d'idées et de concepts) des mathématiques. Nous avons toutefois montré que le raisonnement expérimental ne pouvait atteindre le degré de certitude de la démonstration mathématique sauf lorsqu'il s'agissait de réalité singulière et sous réserve que la sensibilité n'y soit pas abusée par des illusions. |